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dimanche 23 décembre 2012

Interview : Mesa Cosa

Pour leur dernière sortie les français de Casbah Records sont allés jusqu’aux Antipodes pour dénicher le groupe australien Mesa Cosa. Un choix cohérent puisque le son dévastateur du sextette basé à Melbourne est en parfaite adéquation avec le label qui arbore comme logo un rhinocéros à la charge. Sur Infernal Cakewalk les Mesa Cosa n’y vont pas par quatre chemins : poussées dans leurs retranchements, les guitares posent d'emblée les bases d’une orgie sonique qu’on imagine, dès l’intro de "666", bien salasse. Mais c’est sans compter sur l’arrivée d’un saxo diabolique, hurlant à la mort, et, cerise sur le gâteau, d’un chant en espagnol totalement possédé. En l’espace de dix titres Mesa Cosa éructe des hymnes garage-punk à la gloire du diable et de la mort, avec tout le détachement et le fun hérités de leurs ancêtres sud-américains (d’ailleurs Infernal Cakewalk se clôt sur une reprise de Los Saicos). Pour saluer l’excellente initiative de Casbah qui a réédité en vinyle ce disque dingo, on a posé quelques questions à Pablo, le leader d’origine mexicaine de Mesa Cosa.

   
     Comment est né Mesa Cosa ?
J’étais dans un festival et je suis allé voir une diseuse de bonne aventure qui m’a dit de faire un groupe, alors je l’ai écoutée. On a commencé à former le groupe autour de Stewart (tambourins), un ami de longue date, et moi. On a tout de suite adoré le truc organique qui s’est dégagé. Une fois le line-up en place, un saxophoniste est venu se greffer (Llod), il se pointait à pas mal de nos concerts, jouait même avec nous, alors il est devenu un membre officiel. On est basés à Melbourne mais en fait personne n’est vraiment originaire de la ville, on s’est juste rencontrés là bas.

     Quelle est l’histoire de ce Infernal Cakewalk ?
C’est assez basique, on voulait faire des chansons fun et qui font du bruit, histoire d'avoir une excuse pour gueuler tout le temps. On a la chance d’avoir une maison où l’on peut jouer jusqu’à très tard dans la nuit, alors on a commencé à jammer et des chansons sont nées. Ensuite on a économisé de l’argent et on a enregistré tout ça dans le salon, en une journée.

     Pourquoi cette référence à Méliès dans le titre du disque ?
C’est marrant : une nuit je regardais des vidéos sur youtube et je suis tombé sur Infernal Cakewalk de Méliès. J’ai remarqué que le film fonctionne sur le même tempo que notre chanson "666", j’ai alors assemblé les deux et ça a donné le clip. De plus, j’adore tous les symboles, l’univers fantasmagorique et les représentations du diable chez Méliès, on s’est dit que ça serait une bonne idée d’intituler notre disque comme ça.

   
     Comment avez-vous rencontré les français de Casbah Records ?
Je crois que je leur ai envoyé un message une nuit où j’étais défoncé (peut-être la même où j’ai trouvé le film de Méliès) et puis j’ai complètement oublié. Sauf que deux mois plus tard ils m’ont répondu : "ok, on va sortir votre disque",  ça a été un choc !

     C’est important pour vous de le sortir en vinyle ?
Oui, je trouve que c’est un objet qui laisse une véritable trace. Aujourd’hui c’est trop facile de perdre, d’oublier, la musique avec les autres formats. Le Cd c’est fragile, les cassettes c’est chiant…le vinyle c’est le top. En plus on a la fierté de pouvoir dire "on a fait ce truc".

    Jay Reatard a dit un quelque chose comme : "Je peux faire des trucs pop quand je suis en studio, mais une fois sur scène c’est la guerre." Avec vous il semble que ce soit la guerre aussi bien sur scène qu’en studio, d’où vous vient toute cette puissance, cette hargne ?
On a formé ce groupe avec l’idée d’être authentiques. Je vois trop souvent des mecs qui se la pètent, qui essayent à tout prix d’être cool, je trouve ça chiant. Je me suis dit que six mecs qui hurlent dans des micros peuvent être meilleurs que tout ça, et c’est ce qu’on fait. Tu ne peux pas mentir avec l’énergie. Les gens veulent aussi de cette énergie quand ils viennent te voir. Etre capable de leur en mettre plein la gueule et de leur faire oublier un temps leur vie, leurs problèmes, en s’amusant, c’est bien. Voilà, si je devais résumer Mesa Cosa en quelques mots je dirais : de l’énergie, de l’honnêteté, de l’excitation, du bruit, du bordel, du fun.

     

     Qu’est-ce qui te plaît tant dans le garage sud-américain ?
Tout ! J’aime la langue, les symboles utilisés, le son est sale, rêche, granuleux, bref, c’est quelque chose d’unique.

     Dans ta bouche, l’espagnol résonne vraiment comme une langue taillée pour le rock’n’roll…
Oui, il n’y a rien de mieux ! C’est des sons vraiment cool, du genre "moe sta-ca-ta-ma-cha-os". C’est fun à chanter et c’est surtout très rythmique, ça me plait beaucoup.

     Vous reprenez "Alcatraz" des Saicos, pourquoi ce groupe ?
C’est un groupe vraiment incroyable, toutes les chansons sur leur disque sont géniales. Ils ont vraiment un son particulier, un peu brumeux, sale et sombre mais aussi très mélodique. Je pense que c’est un groupe indispensable qui a eu beaucoup d’influence.

     Quelles sont alors vos grandes références ?
Je réponds toujours de la même manière : The B52’s et Los Saicos. Après il y a plein d’autres groupes que l’on adore : JC Satan, Wau y Los Arrrghs, the Zoobombs, Ty Segall, thee Oh Sees, Black Sabbath, Spaceman 3, Molotov, Beastie Boys, Brian Jonestown Massacre, etc. Mais les deux incontournables ça reste B52’s et Los Saicos.

     

     Vous utilisez un saxophone alors que les cuivres sont de plus en plus rares dans le revival garage, pourquoi ce choix ?
En fait ce n’est pas trop un choix ! On a rencontré notre saxophoniste à des fêtes, on était défoncé, on prenait des acides et on faisait des concerts vraiment bruitistes. Ça tombait bien, il adore tout ce qui est noise, il adore le métal, du coup au fur et à mesure des concerts avec lui on l’a intégré au groupe. Ça fonctionne bien.

     Dans vos textes vous êtes obsédés par le diable, l’enfer, la mort …
La mort et le diable sont des concepts que j’adore manipuler, ce sont des sources inépuisables d’idées et de symboles. Par exemple si l’on se place dans la perspective mexicaine, là bas les diables sont colorés, il y en a des bons, des mauvais. Pareil pour la mort, on peut la célébrer, se moquer d’elle. On évoque aussi parfois des choses plus légères, avec Dieu, Marie, etc. Ça me plaît vraiment de parler de tous ces trucs cosmiques, tribaux, mystiques, c’est beaucoup mieux que de chanter sur les filles.

     Qu’est-ce qu’on pense de Mesa Cosa en Australie ?
Justement je pense que les gens ne savent pas trop quoi en penser pour l’instant, on est un peu insaisissables. Mais ça s’améliore de semaines en semaines j’ai l’impression, ils s’habituent à notre manière de jouer, dure et en hurlant tout le temps. Mais je comprends qu’il puisse falloir du temps à apprécier des mecs qui gueulent des trucs sur le diable en espagnol.

     Il y a une scène incroyable à Melbourne, t’aimes vivre là bas ?
La scène musicale de Melbourne est juste dingue, il y a presque trop de bons groupes, à tel point que la compétition est acharnée. Il y a quand même pas mal de branleurs aussi, qui jouent à "qui sera le plus cool" avec tout ce que ça peut avoir de cynique, parce qu’il faut dire qu’à Melbourne c’est très facile de jouer, alors il y en a qui ne se foulent pas trop. Mais bon la plupart ce sont des groupes super comme Midnight Woolf, Baptism of Uzi, The Murlocs (en écoute ci dessous), King Gizzard, Royston Vasie, Damn Terran, ScotDrakula, et beaucoup d’autres.

   
     Quelles sont les meilleures conditions pour écouter du Mesa Cosa ?
En live, je dirais : bourré, un peu défoncé, dans une petite salle tard dans la nuit, avec plein de monde et un ampli cassé.
Le disque : au casque, vraiment défoncé et les yeux fermés.

     Vous semblez appliquer le “rock’n’roll way of life”…
Haha, ouais carrément !

     Vous allez tourner en dehors de l’Australie bientôt ?
On en a très envie ! On aime beaucoup la France et on adorerait venir et par la même occasion aller en Espagne et en Allemagne. On en a parlé avec Ben de Casbah Records, si on a assez d’argent une tournée est envisageable mi-2013 sinon il faudra attendre début 2014.
Punching Joe

Pour continuer :

-L'interview en anglaisFor english readers
-Le site de Casbah Records
-Une chronique complète de Infernal Cakewalk
-A noter que la pochette de Infernal Cakewalk (ci-dessous) a été réalisée par CM Ruiz qui avait déjà travaillé avec Davila 666 et Dead Ghosts et que le disque a été masterisé par l'omniprésent Mickey Young des Eddy Current Suppression Ring.

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