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mardi 31 juillet 2012

Interview : The Space Padlocks

Les Space Padlocks font partie de ces bonnes surprises qu’on a parfois en jetant un œil nonchalant dans les bacs des disquaires. Avec une pochette à l’esthétique Serie B, badigeonnée d’un violet dégoulinant, il a été difficile de résister à soulever la galette pour essayer d’en apprendre plus. Si à ce stade-purement visuel-l’achat était assuré à presque 70%, la vue de la mention « Close Up »  au dos a fini de convaincre. Close up est en effet un excellent  label français à qui on doit notamment  la sortie du très balèze premier LP des Sudden Death Of Stars et divers 45 tours tout aussi indispensables, des Rivals au Dalaï Lama Rama Fa Fa Fa en passant par Périphérique Est, pour ne citer qu’eux. Et cet EP des Space Padlocks est une nouvelle réussite pour Close Up. En quatre chansons les Toulousains imposent un son garage plutôt atypique. "Automatic Waterloo" allie spontanéité crade à la Back From the Grave avec une écriture pop super efficace. D’ailleurs la suivante, "Guru’s Not Dead", fait dans la power-pop lo-fi et vicelarde gavée au LSD. L’autre face est par contre plus planante. "A Question Of Degree" met en avant un chant désabusé sur une instru garage-psyché parcourue de distorsions. Distorsions que reprend la noisy "Sound Of Thunder", qui achève l’EP par des crachats purulents de guitare à l’agonie. On a donc demandé à Thibaut, l’homme à l'origine du groupe, de nous en dire un peu plus sur ce projet.



          Qui sont les Space Padlocks ?
Le groupe existe depuis l'été 2010. Nous sommes actuellement quatre. Il y a moi au chant et à la guitare, Jimmy à la basse et aux chœurs, Aurore à la batterie (elle remplace depuis peu Guitoune qui joue sur l'EP et a quitté le groupe il y a quelques mois) et Thomas au tambourin, guitare et orgue (il est arrivé tout récemment). Nous jouons tous dans différents groupes (The Existentialists, Les Cagettes, Moscow Driver, The Deserteurs). On a vraiment beaucoup d’influences mais je dirais qu'on s'est surtout enfilé des groupes 60s (plus précisément la période '66-'68), mais aussi des trucs punk, de la powerpop et pas mal de choses 80s, que ce soit du garage revival, du post-punk ou du pré-shoegaze.

          Comment vous définissez votre son ?
Je pense qu'on doit avoir un côté punk, un côté pop bricolée et une tendance à l'impro psyché sur un accord. En fait on doit être assez proche de l’esprit des groupes 80's revivalistes sur les bords qui écoutaient la même chose que nous. Par exemple un type comme David Roback, (Rain Parade, Opal, Mazzy Star), tout comme les Jesus & Mary Chain, Steve Wynn, Daniel Treacy, Nikki Sudden ou encore Spacemen 3. D'après moi, beaucoup de ces gens faisaient le pont, par exemple, entre les Byrds et le Velvet Underground, mais aussi le punk, le post-punk, etc. Ce n’est pas forcément conscient mais je pense qu'on se revendique de cet esprit là.

          Dans quelles conditions a été enregistré cet EP ?
On l'a enregistré en deux jours et demi avec Lo'Spider aux manettes à la fin de l'été 2011. C'était vraiment cool et très stimulant de faire ça avec lui. On s'est concentré sur peu de morceaux en fin de compte. Je me souviens qu'il faisait hyper chaud et qu'on buvait des bières à longueur de temps sans jamais parvenir réellement à se saouler. En tout cas on s'est bien marré.

La cover du EP

          Quel est votre rapport à la culture garage, le lo-fi ou même l’esthétique DIY ?
En ce qui me concerne j'ai dû m'intéresser à ce qu'on appelle la culture garage il y a un peu plus de dix ans, quand j’avais 17-18 piges, grâce à des trucs comme l'émission de radio Dig It ! découverte par hasard sur une radio locale que je recevais à Muret (20km de Toulouse) ! Quand tu écoutes ça tu trouves un écho au rejet du mainstream. J'avais déjà une culture très globale de la zic' qui m'intéressait et ça m'a vraiment impressionné de prendre conscience de pas mal de trucs. L'idée avec sa propre culture musicale c'est de savoir où creuser, même quand tu n'as qu'une vague idée. Je fais parti des malades qui ont toujours regardé les crédits sur les disques, et qui ont un besoin maniaque de savoir l'année de sortie. Dans ma ville, parmi mes potes, je ne connaissais personne qui écoutait les mêmes trucs que moi. C'était chiant. Quand j'ai eu le permis, puis la caisse, c'est devenu cool pour les concerts et j’ai pu envisager des choses. En fait j'ai fréquenté les concerts sur le tard.

Pour l'esthétique DIY, quand tu décides de faire avec les moyens du bord et que tu fais un maximum de trucs toi-même, tu touches à quelque chose d'assez grisant. La sincérité du contenu est en quelque sorte au max. Après pour le lo-fi, outre la faute de moyen, il y a le charme particulier qu’ont les sons distordus bien sales et le roulis irrégulier obtenu avec un magnétophone par exemple. C’est enregistrer vite, tant que le morceau est encore frais, en restant soi même surpris par son machin ! Inabouti ou pas, on s'en branle. Une des bases de la légitimité de l'esthétique lo-fi repose sur une réalité qui est que très régulièrement la démo d'un morceau défonce plus que sa version studio.

          Cet EP est votre première sortie physique en tant que Space Padlock, pourtant en traînant sur votre Bandcamp on trouve pas mal de musique (comme les très cool Tea Break demos). C’est quoi ces enregistrements ?
En réalité je bricole des trucs depuis aussi longtemps que j'ai pu toucher une guitare, même sans savoir en jouer. Ces morceaux je les ai enregistrés en 2008 je crois. C'est en quelque sorte le début des Space Padlocks, lorsque j'ai commencé à les faire écouter avec l'intention de monter un groupe.

Une chouette vidéo accompagnant "A Question of Degree"

         Vous êtes basés dans le Sud-Ouest, à Toulouse exactement, tu peux nous décrire l’environnement local, comment c’est de jouer du garage dans les parages ?
Le Sud-Ouest a toujours été riche en bons groupes garage. Perpignan, Bordeaux davantage que Toulouse d'ailleurs. Aujourd'hui, chez nous, dans le garage « actuel » on peut trouver les excellents Shiva & the Deadmen ou les Angry Dead Pirates. Pour ce qui est des infrastructures, c'est pas l'énergie qui manque, ni les assos, mais plutôt les lieux et parfois aussi le public, qui est certes fidèle, mais un peu restreint. Il y a toujours le Saint des Seins et la Dynamo mais tout le monde est un peu dessus. A mon avis il manquerait une ou deux salles/bars de taille modeste pour faire passer aussi les groupes plus petits, sans faire de gros fours. La situation doit ressembler aux autres grandes villes. Après au niveau de la programmation quand tu fais un bilan annuel, tu es quand même assez surpris par le nombre de bons groupes qui passent ici. On n'est pas si mal lotis.

          Comment s’est passée la rencontre avec le label Close-Up ?
On a juste envoyé ce qu'on avait enregistré à quelques labels qui nous bottaient et Close Up a vite répondu.

          Quelles sont les meilleures conditions pour écouter les Space Padlocks ?
Je n'en sais rien. Au casque en étant un peu défoncé peut-être bien.

          T’écoutes quoi en boucle en ce moment ?
Ça change d'une semaine sur l'autre. Moi là en ces temps-ci j'aime bien écouter 1er album solo de Nikki Sudden, et aussi Teengenerate. Dans ma caisse en ce moment j'écoute DMZ. Tout ça me parle.

Punching Joe
Aussi sur le net :
-Le Bandcamp des Space Padlocks pour écouter l'EP en boucle, et tout le reste
-La page Facebook du groupe et celle de Close Up, pour se tenir au jus.
-Pour acheter l'EP, rendez-vous chez un disquaire sérieux ou sur le site de Close Up

vendredi 27 juillet 2012

The Laurels, Plains LP


En posant les bases d’un rock-psyché monolithique, fortement teinté de shoegaze, the Laurels avaient frappé fort avec la sortie de Mesozoic, leur premier EP. Les revoilà fièrement armé d’un premier LP, dénommé Plains, à l’artwork alléchant. Étant passé honteusement à côté de Mesozoic à l’époque, c’est plus avec curiosité qu’avec attente qu’on a jeté une oreille à cette sortie. Et bien nous en a pris.

Si les Laurels ont bien un talent, c’est celui d’ouvrir majestueusement leurs disques. Mesozoic nous envoyait directement dans les cordes avec un "Black Cathedral" hypnotique. Ici c’est "Tidal Wave" qui vient nous fracasser. Une chanson qui porte bien son nom ("raz-de-marée"), mais qui pourrait aussi bien évoquer un décollage spatial, tant la puissance sonique mise en œuvre souffle dès les premiers riffs de guitares, transformées pour l’occasion en réacteurs. Un des meilleurs opening tracks entendu cette année qui introduit un disque où les Laurels exposent clairement leur côté shoegaze. Et attention, ici quand on dit shoegaze, ce n’est pas pour désigner de la pop un brin noisy ou un peu éthérée sur les bords. Non, quand les Laurels parlent shoegaze c’est dans le langage de My Bloody Valentine et de Ride, celui des guitares nucléaires qui crachent des riffs vénéneux, celui des basses étouffantes et de batteries assommantes.

"Tidal Wave"



"Traversing the univers" et ses guitares chaloupées à la Tame Impala ainsi que la fabuleuse "Glacier", viennent finir de bâtir cette fusée pensée pour explorer et contempler des galaxies lointaines. Et une fois leur vitesse de croisière atteinte, les Laurels se permettent des variations intéressantes qui ne cantonne pas Plains à un disque de shoegaze monolithique. "This City Is Coming Down" par exemple, portée par un chant brit-pop étonnant, fait dans la pop très classe et laisse entrevoir une facette du groupe insoupçonnée. Ou encore "One Step Forward (Two Steps Back)", pop-song bizarroïde qui se cache sous un apparat heavy surprenant, mais finalement accrocheur. Ainsi sur l’ensemble du disque l’héritage psyché du groupe n’apparait que par petites touches. Il fait néanmoins quelques percées remarquées sur "Sway Me Down Gently", où l’on aperçoit les fantômes des Warlocks.

Bien en place et jamais à court d’idées, ces Australiens (et oui encore !) qui ont la tête dans le cosmos, réussissent avec succès le test du premier LP. Plains est un album intelligent qui sait gérer ses moments de faiblesses ("Manic Saturday" ou "Changing the timeline", moins inspirées mais placées juste après des killer-songs) et qui magnifient ces moments forts, toujours bien aidé par une production irréprochable. Ladies and gentlemen, we are floating in space.
Punching Joe

L'album, sorti sur Rice Is Nice en écoute intégrale sur bandcamp :


lundi 23 juillet 2012

The Babies 7" : Here Comes Trouble & My Name


Here Comes Trouble 7''

The Babies sont les auteurs d’un des meilleurs albums de 2011, un premier self-titled LP au charme ravageur, gorgé de garage-pop adolescente et catchy. Plus qu’un one-shot, l’alliance entre Cassie Ramone des Vivian Girls et Kevin Morby de Woods est partie pour durer puisqu’un nouveau disque est attendu à la rentrée, précédé d’un single dont un titre est déjà en écoute. Pour vous faire patienter je reviens sur deux excellents 45 tours (un format dont le groupe raffole) sortis il y a quelques mois.

Le premier, Here Comes Trouble, acheté lors de leur venue à l’Espace B l’hiver dernier, a été publié par Teenage Teardrop. Si la face B, "My Tears", est sympa mais plutôt mineure, la face A, "Here Comes Trouble", est une des meilleures compo que le groupe ait sortie. Portée par une tonalité désabusée, la chanson impose une progression langoureuse qui finit magnifiquement par un petit clin d'oeil au "Here she comes now" du Velvet Underground. (NB : des versions lo-fi de ces deux chansons figurent sur le dispensable recueil de démos Cry along with the Babies)

"Here comes trouble"


Le deuxième 45 tours, My Name, est sorti sur Bad Paintings en cours d’année. Il contient deux excellentes chansons ("My Name" et "The War") datant des débuts du groupe, où l'on peut déjà ressentir l'alchimie qui se dégage de ce duo. La guitare surf-pop et candide de Cassie Ramone se mêle astucieusement à la fluidité du song-writing de Kevin Morby, créant une parfaite rampe de lancement  pour leurs deux voix douce-amères, qui déblatèrent des paroles enfantines et désenchantées qu’on croirait échappées d’un dialogue entre Charlie Brown et Patty, des Peanuts de Charles M. Schulz.



Et enfin je vous conseille d’essayer de choper sur la toile un très bon live sorti sur cassette par Kill/Hurt, mais sold-out, nommé Live at the Smell. Vivement la rentrée.
Punching Joe

lundi 16 juillet 2012

The Growlers, Uncle Sam’s A Dick / Drinking Song For Kids, 7"


Si la plupart des groupes ricains qu’on adore en ce moment nous alimentent en sorties très régulièrement (Tim Cohen, Ty Segall, Thee Oh Sees, etc.), the Growlers, eux, sont plus paresseux. L’excellent EP Hot Tropics, date déjà de 2010, et en 2011 ils n’ont sorti qu’un seul single, néanmoins très bon, Gay Thoughts.

Une frustration d’autant plus intense quand on sait que le groupe a enregistré son nouveau disque à l’automne dernier mais que la date de sortie est toujours inconnue. L’histoire promettait pourtant d’être belle : conviés à Nashville par un fan un peu particulier en la personne de Dan Auerbach des Black Keys, les Growlers avaient une sacrée opportunité pour pondre une pépite dont ils ont le secret. Et si l’enregistrement avec Auerbach s’est bien passé selon leurs dires, c’est l’étape de la postproduction qui a posé problème. Terrés dans leur hangar pourri de Costa Mesa, les Growlers font tout eux même depuis près de six ans, alors quand on essaye de les brider et de les faire entrer dans le moule, ces esthètes de la glande s’énervent ; plutôt crever que de renoncer à leur manière de fonctionner, comme le confesse Brooks Nielsen (chant) au LA Weekly : « On a toujours eu une quantité folle de chansons, on en enregistre tout le temps chez nous. Alors ça nous fait chier quand on nous dit qu’on ne devrait en mettre que 13 sur celui-là. Comme si j’en avais quelque chose à foutre que les gens s’emmerdent avec mes 20 morceaux. »

Heureusement il y a quelques jours l’espoir renait. Nielsen avoue dans une nouvelle interview que les choses avancent plutôt bien, qu’il a a priori mis du tabac dans son oinj et que le disque, composé de 15 chansons, parait-il plus joyeuses, pourrait sortir à l’automne. Dans la foulée de cette annonce, à prendre quand même avec des pincettes, le groupe a même sorti un 45 tours à l’occasion de leur tournée US.

Si les deux pistes ne sont pas mémorables pour du Growlers, le plaisir de les retrouver prédomine sur la qualité intrinsèque des chansons. "Drinking song for kids", beach goth à souhait avec sa guitare crépusculaire et la voix, toujours plus sublime, de Nielsen déclenche quelques mouvements d’épaule chaloupés. Et on excuse même "Uncle Sam’s a Dick" d’être un peu poussive, bien rattrapée par un joli refrain et des rythmiques toujours aussi chill. Alors, on se revoit bientôt les gars, sans faute ?

Punching Joe

>Ci-dessous les deux titres en écoute. Et je conseille vivement la lecture de l'excellent reportage du LA Weekly cité plus haut + une vidéo qui illustre bien l'article
>Chronique de Are You in or Out ?

dimanche 8 juillet 2012

Slutever, Pretend to be nice, EP



A l’honneur dans ce billet, des meufs qui en ont une sacrée paire : le duo Slutever. Il semble qu’on ait loupé un truc vraiment cool en 2011, en passant à côté de leur EP Pretend to be nice...il est donc temps d'en parler. 

Nicole Snyder et Rachel Gagliardi sont deux amies adeptes de la weed et des burgers mcdo qui vivent à Philadelphie. Elles qualifient elles-mêmes leur musique de "bratpunk", comprenez punk de morveux, de sales gosses. Et c’est exactement de ça qu’il s’agit car s’il y a bien une chose que Slutever n’est pas, c’est un groupe de jolies poupées aux voix surfaites et aux allures de pubs ambulantes pour American Apparel. Des vraies de vraies je vous dis. Dignes héritières du riot grrrl. D’ailleurs leur musique peut clairement rappeler certains riffs hargneux des grandes Bikini Kill.


En 2010 elles ont enregistré un premier EP maison, au chouette titre Sorry I’m not sorry et au son totalement lo-fi. Elles récidivent en 2011, avec Pretend to be nice, en se faisant aider cette fois par Bantic Media (qui, si j’ai bien pigé, est une sorte de label de leur fac). Le son des quatre pistes est alors plus en place, moins dégueulasse. Certains morceaux, comme mon petit préféré "No offense", déjà présents sur le premier EP, révèlent avec le nouvel enregistrement davantage leur potentiel pop. Les pistes s’en tiennent à leurs bases juteuses garage-punk mais les mélodies se font entendre, appuyées par les voix. Rachel et Nicole se succèdent tour à tour à la batterie, à la guitare et au chant ce qui produit pas mal de variété en seulement quatre chansons, peu commun pour du punk. Quand on leur demande quels sont les groupes cool du moment, Slutever cite volontiers Dum Dum Girls (entre autres) et d'ailleurs le lien entre les deux girls bands est faisable puisque le son des premières est aussi marqué par cette espèce d’évanescence saturée qu’on trouve chez Dee Dee et ses cops (et chez les groupes du même genre). La différence c’est que Slutever est clairement plus radical, ancré de manière évidente dans une boue punk et attaché à un esprit grunge.

Les deux amies sont aussi à la base d’un autre projet, un groupe de punk rock pour enfants (si si), The Weenies dont le premier EP, I can’t like it, comporte des titres aussi significatifs que "I wanna stay up all night" ou "No more veggies". Et puis tout récemment, Rachel a lancé le label Bratty Records (dont l’esthétique du site internet vaut le détour), l’occasion pour les deux amies de sortir un single en cassette, leur dernier morceau "Pussycat"…évidemment.
Hanemone

"Pussycat"



mercredi 4 juillet 2012

Interview : Volage, MADDIE EP


Volage c'est un peu mon obsession du moment. D’abord écouté d’une oreille distraite, leur tout premier EP, MADDIE, passe désormais en boucle dans mon casque, bien aidé par le morceau "Many Hopes", un petit bijou de garage-pop éclatant. Des garageux du genre la tête dans le guidon qui cachent pourtant un groupe à l’esthétique sonore très travaillée. Ici, on ne se repose pas que sur des distorsions disproportionnées ou des amplis qui dégueulent : leur son, certes crado dans la moelle, regorge aussi d’éléments pop, punk et s’appuie sur des chansons limpides, pour ne pas dire imparables. "Not Enuff" et son riff marteau-piqueur par exemple, ou encore la Ty Segallienne "I’m a fool", une belle démonstration de puissance et de changements de tempo. Du coup j’ai voulu en savoir plus et j’ai interrogé Paul Rannaud, compositeur, chanteur, ingé son…bref, l’homme à tout faire de Volage.


       
          Alors, Volage c’est quoi exactement ?
C’est un projet que  j'avais en tête et dans lequel j'ai motivé des potes. On est quatre: Thibaut (batterie), Simon (Guitare), Paul V(basse/guitare) et moi-même (chant/guitare/basse). On est entre Paris, Tours et Le Blanc, dans la région Centre. D’ailleurs là bas on a un garage qu’on squatte pour répéter et enregistrer. J'ai enregistré l'EP l'été dernier. J'ai joué toutes les parties car se sont pour la plupart mes compos et Thibaut a joué ses parties de batterie, sauf sur "Many Hopes" qui était une idée de Simon et qu'on a écrite à deux.

Dans la composition, j'apporte souvent une nouvelle idée de morceau, genre à 70%. Puis on teste ces démos en répètes et ça prend forme ensemble. Parfois, comme pour "Not Enuff" ça se fait sur l’instant : un riff, quelques phrases et on sait déjà qu'on va la garder. On privilégie toujours l'émotion, le riff. Parfois la même suite d'accords n'a rien à voir selon le tempo et la manière de la jouer. On peut s'inspirer de pleins de choses, tant que ça nous touche . Si t'as une vision claire d'une chanson, même si l'idée est folle, l'important c'est d'y croire et de faire passer l'émotion. On cherche un truc qui fonctionne sinon on ne garde pas. On ne se définie pas comme un groupe de punk ou de rock, on s'en fout en fait. On essaie juste de ne pas trop lécher le son, garder le truc un peu sauvage. On a des influences pop, c’est clair, mais aussi un coté vraiment plus crado, parfois lo-fi. On cherche la puissance, l'adrénaline, quelque soit le type de morceau. Après au niveau des influences je pourrais dire plein de chose, mais disons que ça va de Coachwhips (ancien groupe de John Dwyer, Thee Oh Sees) à DJ Screw.


          Vous venez de sortir votre premier EP sur cassette. Pourquoi ce choix ? Que représente pour vous ce support ?

La cassette c’était vraiment ce qu'on voulait. Le CD, pas question, c’est un support chiant et on n’avait pas de thunes pour un vinyle. La cassette c'est le support analogique le plus cool qu'on ait trouvé. Le son est vraiment sympa, même sur cette petite taille de bande. Pour nous c'était un bon moyen de commencer, en gérant vraiment l'ensemble, sans intermédiaire. Et ça permettait en plus de travailler un peu le packaging sans trop de frais. Il y a l’idée du bel objet. Un vinyle c’est un super objet, c’est un vrai choix dans un shop. La cassette c'est pareil, c’est ludique et puis c’est souvent des petits tirages, donc assez rares. Nous, on voulait être content du tout. On à fait des covers hyper débiles mais ca aurait pu être vachement plus sobre, la prochaine le sera, on l’a déjà.
C’est aussi le premier support qu'on ait connu enfants.  On continue même à enregistrer sur des 4 pistes. Ce n’est pas le cas pour MADDIE, mais c’est possible que certains prochains morceaux soient enregistrés et sortis sur cassette.

          Vous avez réalisé MADDIE de A à Z, pourquoi ?
Pour un premier projet, il fallait que ce soit vraiment notre reflet. Je ne voulais pas déléguer quoi que ce soit.  Surtout pour l'enregistrement, le mix et le mastering, je voulais tout contrôler. Ca demande beaucoup de temps car tu as vite fait de faire des erreurs entre les différentes étapes. Mais l'oreille s'habitue. Il fallait que ça soit notre truc, dans sa globalité, des mix au passage sur bande. En plus j’adore l'enregistrement, c'était naturel de le faire nous même. Ce sera pareil pour les prochains, ils seront beaucoup plus énervés mais plus pop encore pour certains.

          Le garage a le vent en poupe depuis quelques années, comment êtes-vous tombés dedans ?
En fait on a tous toujours fait de la zik, depuis gamins, et chacun pleins de trucs différents. Avec Volage je voulais vraiment faire quelque chose de sale et bruyant, c'est comme ça qu'on a commencé avec Simon. Ensuite Paul V. et Thibaut sont venu jouer avec nous quelques fois, ça a très vite marché et on était tous d'accord en termes d'esthétique sonore. L'intention de base c’était de ne pas faire un truc trop léché, mais ensuite, le son tel qu’il s’est développé, c'est venu tout seul, ce n’était pas réellement une démarche consciente.

          Y-a-t-il des groupes français dont vous vous sentez proches actuellement?
Ouais, il y a une super scène garage en France. On a organisé un concert avec J.C Satàn sur Poitiers, parce qu'on adore ce qu'ils font, même si nos sons sont différents. Pareil pour les Strange Hands (+ une interview), on a l'impression de marcher sur leurs traces.




          Quelles sont les meilleures conditions pour écouter Volage ?
Très fort sur le poste cassette de ton van, pendant un road trip direction nulle part, avec tes potes qui s'envoient de la codéine à l'arrière avec leurs meilleures copines. Sinon en live bien sûr !

          D’où vient votre nom d’ailleurs ?
En fait on ne voulait pas forcément un nom à consonance anglaise. Volage c’est différent, ça évoque pleins de possibilités, ce qu'on ne se refuse pas quand on écrit nos sons. Les seuls autres noms qu'on avait c'était les Khadafistfucking et Simon voulait absolument qu'on choisisse "Les petits pédestres". On l'en a empêché.

        Vous semblez taillés pour le live, comment vous appréhendez cet exercice?
Le live c'est vraiment un super moment. On essaye de tout donner, déjà pour être à la hauteur et que le morceau soit ce qu'il devait être, et aussi, tout simplement, pour prendre le plus de plaisir. Ça triche pas un live, donc faut donner de soi. Je recherche vachement le moment ou tu arrêtes de penser, de calculer ce que tu fais, c’est là où les choses se créent. Ça demande beaucoup de répétitions, ce qu'on a du mal faire car on est toujours à droite à gauche les uns les autres.

         Quelle est votre actualité dans les mois à venir ?
On va enregistrer en août et je vais essayer de mixer entre 5 et 10 titres, selon le temps. Du coup on devrait sortir une nouvelle cassette courant octobre ou novembre. Sinon on aimerait bien sortir un 45 tours, genre 4 titres ce serait cool, si un label veut bien nous le sortir ! On a plusieurs projets de vidéos aussi, dont un petit clip avec le prochain projet. Sinon, on prévoit de tous aller vivre dans les garages à coté du notre et d'y vivre comme des néo-hippies, avec notre studio à coté, le canapé en cuir de chez Emmaüs et le piano blanc à touche rouge.


A venir : Tournée française en octobre / novembre 2012 (dates à venir) + nouvelle cassette en novembre
Suivre Volage sur Facebook et Bandcamp (téléchargement gratuit + achat de la cassette)
Aussi sur le web : Volage dans Styrofoam Drone



La playlist de Paul -> ses 5 obsessions du moment :

-"She took a long cold look"- Madcap Laughs - Syd Barett
-"Slaughterhouse" - Slaughterhouse - Ty Segall Band
-Tout Family Perfume VOL1/2  - White Fence
-"Freak When I'm Dead"- Was DeadKing Tuff
-"Paranoid" - J.C Satan (Black Sabbath cover)

Punching Joe