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vendredi 16 août 2013

The Readymades-I’m a Man, I’m a Flower

Made in Sacramento 2/2



Après un premier épisode consacré à l’histoire de Public Nuisance, les génies sixties oubliés, on effectue un bond dans le temps pour se retrouver à l’orée des années 2000 avec the Readymades. Une plongée au-delà du lo-fi en compagnie d’une bande de gamins bien trop timbrés pour se faire une place à l’époque du "garage Converse".

C’est par une orgie rock’n’roll débridée que se conclue l’unique album des Readymades de Sacramento I’m a man I’am a flower. Une reprise apocalyptique de "Wild Thing", de plus de dix minutes, sous forme d’un jam sur-saturé qui se perd rapidement dans un brouillard de larsens, et autres sons inidentifiables, fascinant. Et forcément on pense aux Hunches, référence des années 2000 dans la catégorie "garage de l’extrême", dont la musique, trop brûlante pour cette période tiède, était animée par la même furie.


Pourtant, en bon groupe de lycée éphémère, les Readymades n’auraient jamais dû enregistrer de chansons. Le bassiste Charles Albright se souvient : "Nous étions trop jeunes pour penser à sortir un disque. En fait, les chansons ont été enregistrées après notre séparation. J’étais très attaché à ce groupe alors j’ai motivé tout le monde pour qu’on enregistre quelque chose, au cas où…j’ai bien fait finalement. On a aussi failli sortir deux 45 tours, un autoproduit et un sur le label de Scott Soriano, Moo-La-La Records, mais aucun n'a vu le jour." En effet, Charles a bien fait puisque douze ans plus tard le label de Los Angeles Mt.St.Mnt. (Mount Saint Mountain) vient d’éditer ces enregistrements inédits captés chez Chris Woodhouse, créant l’album I’m a Man, I’m a Flower, soit 13 titres garage-punk parfaitement amateurs et destructeurs.

Cette énergie folle, dénuée de considération pour le son, qu’on pourrait qualifier de no-fi, est le produit de la rencontre entres quatre ados désintéressés, qui voulaient simplement faire du bruit dans leur cave : "Le groupe s’est formé à la fin des années 90, poursuit Charles Albright, et était composé de moi-même à la basse, Candice Adams au tambourin, Jeff Melendez derrière les fûts et Sir Richard M. Haley au chant et à la guitare. On s’était rencontré dans un lycée de la banlieue de Sacramento. Avec Candice et Jeff on avait un groupe de punk hardcore, Milhouse SMF tandis que Richard jouait dans Wil Sweeties, un groupe fortement influencé par Billy Childish. On n’avait aucune ambition si ce n’est d’avoir un groupe ensemble et de tenter des choses. Je n’avais jamais joué de basse et Richard voulait s’essayer au chant."


De cette formation hasardeuse se dégage une tornade de spontanéité qui redonne foi dans le mot rock’n’roll. Cette immédiateté est d’ailleurs soulignée dans le nom même du groupe, en référence à Marcel Duchamps. Essentiellement composé d’éjaculations garage-punk d’1m30, I’m a Man, I’m a Flower, est un disque fracassé où rien ne tient debout, où tout dérive. On aperçoit donc les Hunches, mais aussi l’ombre titubante des Mummies tout comme le groove déchiré des Cramps. A côté de la plaque, les Readymades l’étaient donc forcément : "A l’époque on ne se sentait proche de personne. On jouait beaucoup avec les A-Frames, un super groupe. The Wizards aussi, des potes de Sacramento mais que personne ne connait. En fait on ne se retrouvait dans aucune scène garage à la mode à l’époque. Il y avait beaucoup de poseurs, ça ne nous correspondait pas. Finalement on avait plus de choses en commun avec des groupes actuels, comme Ty Segall, Thee Oh Sees ou toute la constellation Burger Records. Enfin je ne vais pas nous comparer à eux, ils sont bien meilleurs." 

Le groupe se sépare à l’amiable, les membres étant engagés dans d’autres formations (les Duchess of Saigon pour Richard M. Haley et une carrière solo pour Albright). Reste donc un disque, témoignage d’une période éphémère qui a cependant permis aux Readymades d’écumer les petites salles de concert de la côte Ouest : "Si l’on n'a rien sorti, on a quand même fait beaucoup de concerts. Je me rappelle de premières parties des Urinals, des High Fives. On a même dû ouvrir pour les White Stripes, mais je ne suis plus sûr. On ne faisait pas l’unanimité mais on rigolait bien quand on se rendait compte qu’on faisait fuir les gens. J’ai même fait une cassette avec les rires des spectateurs qui se foutaient de notre gueule lors d’un concert à San Jose." Pourtant, aujourd’hui, on n’a plus envie de rire, bien trop triste à l’idée qu’on ne pourra jamais voir Richard Albright et sa bande jouer "Ad Reinhardt Syndrome" ou la sublime "Pink". Tout comme on ne pourra probablement pas mettre la main sur le vinyle de Mt.St.Mnt., réédité à seulement 100 exemplaires ayant déjà trouvé leur propriétaire.

Quand à Sacramento, notre fil conducteur, Richard Albright nous en livre une vision loin des stéréotypes : "Sacramento est un ville attachante, qui mêle l’esprit de la Baie de San Francisco, toute proche, avec une ambiance Midwest. La vie y est très agréable et il ne faut pas la sous-estimer. Ma famille a ses racines là bas et je fais de mon mieux pour mettre en avant ses qualités et en faire un endroit cool. C’est facile d’y lancer un groupe et de commencer à répéter, même s’il manque la cohésion et la dynamique qu’on retrouve à San Francisco par exemple."

Propos recueillis par Punching Joe


Rappel : l'épisode 1 de notre mini-dossier "made in Sacramento" avec Public Nuisance.
Une playlist concoctée par Charles Albright, et le lien vers son bandcamp.

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