A l’écoute d’un disque de garage, de punk ou de tout autre sous-genre rock’n’rollesque, on ne prête pas forcément une attention démesurée au chant. Au pire c’est un accessoire, au mieux un petit plus. Pourtant quand un grand vocaliste fait irruption, on comprend que sa seule présence peut transformer un bon disque en œuvre géniale. C’est un peu le cas avec le premier LP des australiens Royal Headache. Si leurs chansons, mélangeant power-pop et punk, sont excellentes, elles prennent une autre dimension grâce à un certain Shogun, qui bouffe le mic avec un charisme incroyable.
Sorti en 2011 sur R.I.P Society (Woollen Kits, Straight Arrows), on a découvert récemment le disque grâce au label français XVIII Records, chargé de distribuer la bête dans nos contrées. Et sur le papier le menu est alléchant : 12 chansons, à peine 30 minutes, le tout sous l’égide de Mikey Young (Eddy Current Suppression Ring) et Owen Penglis (Straight Arrows) à la production. Banco !
Les premières écoutes peuvent laisser perplexe : ça va vite, très vite, trop vite ? Une rickenbacker virevoltante met les radars dans le rouge. Un instant, on soupçonnerait presque une réincarnation de Jay Reatard. Heureusement, quand le palpitant se calme et que le cerveau finit par comprendre ce qui lui arrive, la musique de Royal Headache se déploie dans toute sa splendeur. Aussi concises et fulgurantes soient-elles, leurs chansons sont d’une fluidité incroyable. On croirait entendre Is this It des Strokes joué en 45 tours par minute ("Surprise") avec la section rythmique des Eddy Current Suppression Ring. Solide.
"Pity" live
(Shogun ou l'anti-hipster)
Difficile de réduire le disque à un genre unique tant les compositions dévoilent petit à petit leurs multiples facettes. La face A fait la part belle au punk qui sent bon des aisselles ("Never again") et à la power-pop qui claque ("Girls"), tandis que la face B s’oriente vers la pop anglaise ("Distant and vague"), le garage ("Pity") ou encore le surf ("Wilson street"). Le tout sublimé par ce fameux Shogun. Son timbre singulier, quelque part entre la délicatesse râpeuse de Julian Casablancas et les intonations désuètes de Morrissey, ne fera sans doute pas l’unanimité mais tout de même, voilà un type au charisme vocal bluffant ! Libres, brutales, démodées, touchantes, chacune de ses éructations, à la sincérité incontestable, donne épaisseur et fougue à cet album déjà indomptable.
Première grosse claque de l’année ce LP de Royal Headache ne devrait pas prendre la poussière de si tôt. Rares sont les disques qui provoquent une telle sensation de plénitude et marient si facilement l’urgence punk et vrai grand chanteur. Pas évident en effet de mettre de l’âme là où l’instantané prime. En ce sens il est impossible de ne pas penser aux sublimes Undertones, desquels Royal Headache se rapproche naturellement. Ouais, la classe on vous dit.
Punching Joe
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