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dimanche 10 juillet 2011

Tim Cohen, Laugh Tracks

Oh, what a feeling

Non content de bâtir une discographie irréprochable avec son groupe the Fresh & Onlys, Tim Cohen  sévit aussi en solo et livre des disques aussi splendides qu’introspectifs.  Depuis 2008 le barbu de San Francisco n’a cessé de composer, au point de n’avoir même plus le temps de se raser : trois albums avec les Fresh & Onlys, trois autres en solo et un nombre indécent d’EPs. Loin de la pression des maisons de disques Tim Cohen profite d’une totale liberté pour nous faire partager son état de grâce musical, construit autour d’enregistrements lo-fi et d’une sincérité troublante. Ce Laugh Tracks (Captured Tracks), sorti il y a un an, est son deuxième disque. A la fois intimes et lumineuses, ses onze chansons constituent une œuvre quasi parfaite qui risque de rester dans les annales du rock indé.
A la première écoute de nombreuses filiations viennent à l’esprit. On peut par exemple ressentir la sensibilité d’un Jeff  Mangum (Neutral Milk Hotel), la douce folie inspirée d’un Anton Newcombe (the Brian Jonestown Massacre) ou même la touche anti-folk d’un Jeffrey Lewis. Mais à mesure que l’on digère le disque, toutes ces références s’évaporent pour laisser place à une musique que seul Tim Cohen semble capable de produire. Le son est plus " folk " qu’avec les Fresh & Onlys et les digressions dans les arrangements sont plus nombreuses (trompettes, bidouillages, claviers-jouets, etc.). Mais la qualité d’écriture, elle, est intacte ; elle est même poussée à son apogée.
" She loves me all the time, even when my back is turned "
"Oh Oh Oh " et " Wonderfull life " inaugurent magnifiquement ces 40 minutes de bonheur béat. Sa voix gorgée de tendresse, des chœurs discrets et un jeu de guitare tout en caresses, nous plongent dans  l’intimité de ce nounours mélancolique. Sa plus grande réussite est d’oser tout un tas d’arrangements riches et improbables sans que ceux-ci ne prennent le dessus sur l’essence des compos. D’autant plus qu’envoyer les trompettes et les claviers eighties (" Send no sign ", " A mind of their own ") sur du fait maison peut paraître un peu casse gueule. Au détour d’une interview il avoue essayer de produire le meilleur son avec ce qu’il a sous la main. Et le résultat est bluffant : aucune faute de goût et un sentiment de liberté totale, très communicatif. Même pour la voix Tim se lâche : tantôt folkeux à fleur de peau (" That’s my babe " ou LA chanson pour tomber amoureux) tantôt crooner lounge (" Mine’s the one "). La fin de l’album est elle aussi renversante. " Pray for me " est un chef-d’œuvre, avec son petit clavier retro et ses relents psyché. C’est l’ultime preuve que le lo-fi peut être travaillé et sonner magnifiquement. Puis avec " Small things matter " Tim rentre dans le corps de Daniel Johnston pour une pop song autiste et lunaire, digne de " True love will find you in the end ".
Cet album est déjà un peu un classique. Il a une saveur unique, faite de paradoxes : des ambiances de grenier mais un sentiment de rayonnement euphorisant, du lo-fi mais des arrangements soignés comme rarement, etc. Chaque écoute est un nouveau plaisir, une nouvelle découverte. Pourvu qu’il ne redescende pas de sa canopée. Ce gars est sacré.
Punching Joe

"Oh Oh Oh"

"That's my baby"

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